BURKINA FASO : IBRAHIM TRAORÉ VA-T-IL RESTER AU POUVOIR ?

Publié le 12 October 2022

Le Burkina Faso, à la base, opérait par des coups d’État. Mais le spectacle de deux coups d’État en huit mois, de surcroit, du même régime, est hors des normes habituelles. Des assises nationales auront bel et bien lieu les 14 et 15 prochains pour désigner un président de transition avant l’organisation des élections de 2024.

Falone AZINLO

« De la qualité de ces assises nationales dépendra l’avenir du pays, puisque les forces vives de la Nation devront non seulement doter la transition d’une nouvelle charte, mais aussi et surtout trouver l’oiseau rare qui présidera à notre commune destinée les 24 mois à venir. La question se pose d’ailleurs de savoir si le futur président du Faso sera un civil ou un militaire, en l’occurrence le capitaine Traoré lui-même, car même s’il a promis dès sa première prise de parole qu’il remettrait le pouvoir à celui qui serait désigné pour retourner au front, certaines voix s’élèvent pour le conjurer de garder “sa chose”, pour laquelle il s’est battu. » s’exclame L’Observateur Paalga à Ouagadougou.

Toujours dans ce sens, Jeune Afrique se demande aussi si « le capitaine putschiste pourrait-il se laisser tenter ? Que va faire Ibrahim Traoré ? Quelques jours après le putsch, il avait assuré qu’il ne resterait au pouvoir que le temps d’expédier ”les affaires courantes”. Pourrait-il se dédire sous la pression de ses partisans et accepter le poste de président de la transition, où choisira-t-il de s’effacer face à un civil, comme le réclame déjà le Front patriotique ? ».

Pourtant, toujours selon Jeune Afrique, « les jeunes officiers ne vont rien lâcher. Ils veulent que le capitaine Traoré conduise la transition et c’est sans doute ce qui va se passer. Ils considèrent que Damiba a dévié de la feuille de route qui était la sienne et ils ont décidé de rétablir les choses. »  

L’analyste politique Issouf Maiga, de son côté, pense qu’ « aucune figure civile ou militaire ne fera de toute façon l’unanimité. Pour éviter les plaintes et le sentiment d’une victoire d’un camp sur un autre, il serait sans doute sage de maintenir le jeune capitaine. Il pourra remplir sa mission de sécurisation du pays et confier à un civil de bonne moralité, qui pourrait être son vice-président ou son Premier ministre, les questions politiques et économiques, conformément au calendrier de la Cédéao. » a-t-il affirmé.

QU’EST CE QUI ENTRAVE LA LIBERATION DES MILITAIRES IVOIRIENS RETENUS AU MALI ?

Les 46 militaires sont toujours en prison bien que leurs libérations étaient prévues pour le samedi 8 octobre passé. Pour certaines sources proches de la médiation, les autorités maliennes et ivoiriennes ne s’entendant pas sur le lieu où devraient être remis les détenus. Un autre point non négligeable, mais pas connu de tous, certains de ces soldats ne seraient pas de la nationalité Ivoirienne ; mais seraient plutôt originaires du Libéria et de la Sierra Leone.

Aussi, d’après Aujourd’hui à Ouagadougou, « Bamako n’aurait toujours pas lâché l’histoire de la “contrepartie”. Peut-être pas une libération contre des opposants, mais contre espèces sonnantes et trébuchantes de la part de la BCEAO, financement que pourrait faciliter Abidjan, et surtout Alassane Ouattara, ex-gouverneur de cette banque centrale. Un deal que côté ivoirien, on est prêt à nouer, mais après élargissement des 46 soldats. On le voit, constate Aujourd’hui, ce dossier brûlant, qui fait grésiller l’huile sur le feu entre le Mali et la Côte d’Ivoire, connaît des épisodes à rebondissement. Sérénité et optimisme au bord de la Lagune Ebrié, surenchère, prudence et calcul politique du côté du fleuve Djoliba. »

Pour épicer les choses, le quotidien ouagalais précise que : « depuis le double coup d’État au Mali, rien ne va plus entre les deux capitales. Abidjan n’admet pas ce changement de régime par la force et Bamako soupçonne Abidjan d’avoir été un des inquisiteurs dans les sanctions de la Cédéao qui l’a frappé. Pires, les autorités maliennes sont fâchées contre la Côte d’Ivoire qu’elles accusent d’être “manipulée” par la France. Une France que ne cesse de flétrir la junte malienne. D’aucuns n’hésitent d’ailleurs pas à voir dans ce dossier, une guerre froide menée par procuration par le Mali contre la France, à travers la Côte d’Ivoire. En attendant, il y a 46 soldats ivoiriens qui veulent leur liberté, retrouver leurs frères d’armes et surtout leurs familles. »