Législatives sénégalaises : Un référendum pour un 3e mandat de Macky Sall ou l’amorce d’une cohabitation ?

Publié le 29 July 2022
Législatives sénégalaises : Un référendum pour un 3e mandat de Macky Sall ou l’amorce d’une cohabitation ?

À J-2 du scrutin législatif sénégalais du 31 juillet, les huit listes en compétition profitent plus que jamais de ce dernier jour de campagne pour convaincre les électeurs. Alors que la coalition présidentielle Benno Bokk Yaakaar espère conserver sa confortable majorité à l’Assemblée, les principales forces de l’opposition notamment l’alliance formée par les coalitions « Wallu Sénégal » et « Yewwi Askan Wi » font feu de tout bois pour imposer une cohabitation au président Macky Sall.  

Par Roland Achille DIDE

Pour ces élections législatives sénégalaises, de ce dimanche 31 juillet, 8 listes sont en compétition. Pour nombre d’observateurs, à l’instar de Mamadou Lamine Sarr, enseignant en sciences politiques à l’Université Virtuelle du Sénégal, les 20 jours de campagne se sont écoulés « sans réel débat de fond sur les programmes ». « Terne », « drôle » voilà les deux mots qui reviennent le plus, lorsqu’il s’agit de qualifier cette campagne électorale qui a commencé dans un contexte politique assez inédit. En effet, les deux principales forces politiques compétissent chacune avec une seule liste ; le Conseil Constitutionnel ayant invalidé la liste nationale de titulaires de Yewwi Askan Wi menée par Ousmane Sonko et la liste des suppléants de Benno Bokk Yaakaar. 

Axée davantage sur les sujets de passion que sur les programmes, la battue des électeurs a laissé nombre de Sénégalais plus que dubitatifs. Avec Aminata Touré, ancienne Première ministre, comme tête de liste nationale, Benno Bokk Yaakaar a surtout mis en relief le bilan de Macky Sall durant la campagne. Les réalisations emblématiques (Train Express Régiona, le nouveau stade, le Palais des Sports de Diamniadio, …) du président sénégalais au pouvoir depuis 10 ans, ont été les supports utilisés pour attirer la faveur des électeurs. 

Bien que hors course du fait de sa disqualification, Ousmane Sonko, le maire de Ziguinchor et député sortant, a été omniprésent durant la campagne, enchaînant les meetings et les visites de proximité. « Qu’on l’apprécie ou non, on ne peut pas nier sa capacité à mobiliser les foules, il y a un phénomène Sonko », estime d’ailleurs un observateur de la vie politique sénégalaise. Il faut dire que le leader de Yewwi Askan Wi a su surfer sur sa troisième place à l’élection présidentielle de 2019 sans oublier que son arrestation dans cadre d’une présumé une affaire de viol a suscité énormément de sympathie pour sa personne surtout au niveau de la jeunesse sénégalaise.

Aussi, en s’alliant avec la coalition Wallu Sénégal, formée autour de l’ancien président Abdoulaye Wade, Yewwi Askan Wi espère imposer une cohabitation au président Macky Sall aux lendemains de l’élection législative. Le principe de fonctionnement de cette super alliance est simple : chaque coalition s’engage à soutenir l’autre dans le département où elle est en position de force. Ainsi, pour Ababacar Fall, secrétaire général du Gradec, le groupe de recherches et d’appui pour la démocratie participative et la bonne gouvernance, il est évident que cette alliance « peut faire mal à la majorité ». «La stratégie peut être payante, si elle est bien comprise par les électeurs», affirme-t-il.

La désaffection des Sénégalais pour la campagne 

Pour l’heure, préoccupés qu’ils sont par l’inflation et la cherté de la vie, les Sénégalais sont partagés entre défiance et indifférence. L’augmentation des prix des denrées de première nécessité, tout comme celle du coût du carburant font qu’ils ne suivent cette campagne que d’un regard lointain. Encore que les fortes pluies qui ont lieu récemment, avec leur lot d’inondations, n’ont fait qu’augmenter les ressentiments et la perte de confiance à l’égard des hommes politiques. Cependant, dimanche prochain, ils doivent élire 165 députés, selon un scrutin proportionnel réunissant des listes nationales, avec 53 parlementaires, et un scrutin majoritaire, avec 97 autres, devant représenter les 46 départements du pays, auxquels s’ajouteront 15 députés issus de la diaspora. Pour le scrutin proportionnel, chaque force politique en compétition présente une liste de titulaires et de suppléants 

Du reste, ces législatives qui ont lieu six mois après les élections locales, sont le dernier scrutin avant la prochaine présidentielle de 2024. « C’est un échauffement », estime le chercheur Mamadou Lamine Sarr, avant d’ajouter « tout le débat politique est monopolisé par l’échéance de 2024 ». Une chose est certaine, si Macky Sall n’a pas encore jugé utile de dévoiler ses intentions, Ousmane Sonko de son côté a déjà affiché clairement ses ambitions.