CHANTAGE CONTRE LE ROYAUME DU MAROC

Publié le 20 January 2023
CHANTAGE CONTRE LE ROYAUME DU MAROC

LES JOURNALISTES FRANÇAIS REFUTENT TOUTES ACCUSATIONS

Lundi 16 janvier, deux journalistes de renommée internationale, Catherine Gracie et Éric Laurent, ont été condamnés pour extorsion au Royaume du Maroc. En 2015, ils ont convenu d’un règlement financier pour garder le silence pendant qu’ils préparaient la sortie d’un nouveau livre qui allait être un blockbuster. 

Falone AZINLO (Décryptage)

Il y a huit ans, deux journalistes de renom, Éric Laurent et Catherine Graciet, ont reçu 2 millions d’euros de l’entourage du monarque marocain pour éviter de publier un livre qui embarrasserait la famille royale. En effet, Catherine Gracier, reporter d’investigation de longue date pour l’hebdomadaire marocain, s’est associée à son collègue et ancien reporter de Radio France Éric Laurent pour faire de multiples aveux suicidaires sur l’Empire marocain ; ce qui a fait d’eux des auteurs et journalistes redoutés et craint à Rabat. Ainsi, l’ouvrage qu’ils allaient publier en 2015 pourrait être la goutte d’eau qui allait déborder le vase.  Finalement, ils auraient accepté un pot-de-vin pour rompre la sortie du livre : « J’ai plongé dans cette offre marocaine et je le déplore », Éric Laurent à l’audience. Des aveux corroborés par sa collègue Catherine Graciet, 48 ans, auteur d’ouvrages sur le Maghreb et la Libye : « Oui, je reconnais une transaction financière, mais ce n’est en rien une infraction pénale », a-t-elle déclaré. En conséquence, les deux journalistes ont reconnu lors de l’audience qu’ils avaient signé un protocole d’accord dans lequel ils s’engageaient à renoncer à tout livre ou matériel concernant le roi et le Royaume du Maroc en échange de deux millions d’euros.

COMMENT LE CONTRAT A-T-IL ETE SIGNÉ ?

L’accord sera signé en présence du nouvel avocat du royaume et anciens associés d’Éric Dupond-Moretti, Antoine Vey et Ralph Boussier, ainsi que de l’incontournable Me Hicham Naciri (qui n’était pas présent à l’audience). Ce jour-là, les deux journalistes ont chacun reçu une enveloppe de 40 000 euros. Aucun des répondants n’a soulevé d’objection à ce contrat. Arrêtés au Maroc parce que leur conversation a été enregistrée par la police française qui les a dénoncés il y a quelques semaines et arrêtés pour délits actifs dans le hall de l’hôtel : « Imaginez que nous n’ayons pas eu les trois enregistrements, qu’on n’ait pas eu les 80 000 euros et la reconnaissance écrite et manuscrite des deux prévenus, là cela aurait été compliquéSi on avait voulu négocier, on n’aurait jamais déposé plainte, il faut être lucide et logique. » souligne Ralph Boussier, avocat du royaume.

Pourtant, l’ensemble du scénario a été qualifié de fabrication de preuves, sans commission rogatoire au Maroc, mais sans nier la culpabilité morale des deux journalistes, comme l’a admis l’un de leurs avocats, Éric Moutet : « La culpabilité morale, l’impolitesse d’accepter une somme d’argent à ne pas publier, ce qu’ils ont toujours reconnu. Pas de difficulté, plaide-t-il. Mais il y a un gouffre entre faute professionnelle devant la commission des accréditations presse et extorsion devant le tribunal correctionnel. »

Pourquoi Hicham Naciri a-t-il supprimé les premiers audios de son iPhone alors qu’un Airdrop a suffi à transférer des fichiers”, s’interrogent les avocats des deux journalistes ? Tous contrefactuels, Catherine Graciet et Éric Laurent ont écopé d’un an de mise à l’épreuve et de 15 000 € d’amende. La délibération est prévue dans deux mois.